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Évitez de commettre cette erreur en négociation

Par Michel Ghazal le 9 septembre 2019

Depuis sa prise de fonction, Boris Johnson a brandi ce qu’il ferait si l’Union Européenne refusait de renégocier l’accord conclu avec Theresa May : une sortie avec un « no deal » le 31 octobre.

Le litige porte plus particulièrement sur un point : le « filet de sécurité » destiné à protéger l’Europe des produits non européens ET à éviter de créer une frontière physique entre les 2 Irlande.

Dans les faits Boris Johnson a mis en avant sa Meilleure Solution de Rechange à un accord négociée (sa MESORE) : un « hard Brexit ».  Sur le plan strict de la négociation a-t-il eu raison de le faire ?

Une MESORE peut cacher une PISORE

Si nous recommandons vivement au négociateur de trouver une MESORE avant de rentrer en négociation et de s’acharner en permanence à l’améliorer, nous l’alertons sur les conditions de son utilisation : faut-il la dévoiler ? à quel moment ? et surtout comment le faire pour éviter de bloquer les échanges ?

Si vous négociez une augmentation de salaire, il est important d’avoir déjà en poche une autre offre d’emploi avec la rémunération souhaitée. En cas de refus manifeste de la part de votre interlocuteur d’en discuter, vous pouvez toujours dire : « Je ne voulais pas vous en faire part pour éviter de vous bloquer, mais j’ai reçu une autre offre plus attrayante correspondant à ma valeur sur le marché. Je serais très heureux si ensemble nous pouvions trouver une solution qui s’en rapproche et qui soit satisfaisante pour nous deux ». Si cela s’avère impossible, vous pourriez alors démissionner en toute quiétude. Mais si vous n’avez pas d’autres offres et vous vous plaisez quand même dans l’entreprise, vous éviterez de menacer votre hiérarchique de partir si ce dernier refuse de vous accorder l’augmentation réclamée. Car il le vivra certainement très mal et risque de vous rétorquer : la porte est grande ouverte. Dès lors, vous seriez bel et bien piégé.

Dans le cas de Boris Johnson, autant il est vrai que sa MESORE est une sortie assumée de l’UE avec un « No Deal », autant il s’avère dans les faits qu’il n’a pas réellement mesuré la valeur de celle-ci.

En effet, d’un côté Michel Barnier a clairement signifié que le « filet de sécurité » entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord n’est pas négociable, et de l’autre côté, BoJo fait face à une fronde du Parlement qui l’a mis en minorité à plusieurs reprises et qui s’apprête à promulguer une loi anti-no-deal; il s’est trouvé dépourvu de majorité  par la démission d’un des membres de son parti; il voit aussi pointer la menace d’éclatement du Royaume-Uni avec la perspective d’un second référendum d’indépendance en Écosse et un Sinn Fein qui réclame à nouveau la réunification de l’Irlande.

D’où la question : la MESORE du Premier Ministre serait-elle dans les faits une PISORE (Pire Solution de Rechange à un accord négociée) ?

Quand la MESORE n’est pas attractive, nous recommandons au négociateur de ne pas commettre l’erreur de menacer d’y recourir. Bien au contraire, nous l’encourageons à se montrer ouvert à la négociation et à se montrer inventif pour trouver d’autres solutions pour satisfaire au mieux ses intérêts. N’est-il pas possible, par exemple, d’imaginer un « filet de sécurité » entre les 2 Irlande seulement et n’englobant pas l’ensemble du Royaume-Uni ?

En conclusion

Même s’il est certain que l’intérêt de l’UE est de trouver un accord, celui-ci ne peut pas l’être à n’importe quel prix. De même, il est indispensable de s’entourer d’alliés fiables assurant de leur soutien avant d’informer son interlocuteur de ses intentions en cas d’échec de la négociation. Dans le cadre d’une relation suivie, la MESORE, qui définit le rapport de force dans une négociation, doit être maniée avec extrêmement de prudence.

Au lieu de se séparer de L’Europe, le Premier Ministre Britannique est-il en train de transformer le Royaume-Uni en Royaume désuni ?

Et vous, qu’en pensez-vous ?

Voir Aussi

le Centre Européen de la Négociation, cité dans Le Point.

Négociations sociales : gare aux trois fausses pistes !

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